Maximum illud : les intérêts du Christ, uniquement !

Le pape François appelle à commémorer le centenaire de la promulgation par Benoît XV de la Lettre apostolique Maximum illud (voir Peuples du Monde, n°484). Belle occasion de lire ce texte, et le replacer en son époque.

Le titre d’abord ? Il faut lire « Maximum illud sanctissimumque munus quod […] Iesus Christus discipulis demandavit« . Rouvrons le Gaffiot : « munus« , c’est la tâche, la charge, la mission en définitive. « Belle et sainte mission entre toutes celles […] que Jésus-Christ confiait à ses disciples. »

Quant au corps du texte, il peut appeler, parmi d’autres trois réflexions.

-Bien loin, en premier lieu, de ce qu’on appellerait aujourd’hui « l’esprit d’Assise », reconnaissons que l’Eglise ne s’embarrasse pas, en 1919, d’une grande tolérance interreligieuse. « Les hommes innombrables assis dans les ténèbres, le milliard de païens, des populations barbares et grossières, des infidèles plus sensibles aux impressions qu’aux raisonnements, voués au déchaînement aveugle des passions… », ce vocabulaire peut choquer cent ans après ; heureusement, la suite du XXe siècle en a débarrassé l’Eglise.

-En contrepoint, Benoît XV ouvre l’avenir de la Mission à la formation et l’organisation d’un clergé « indigène ». Même si, là aussi, l’expression passe mal de nos jours, la vision est positive et étayée, puisqu’elle valorise « ceux que tout, naissance, mentalité, impressions, idéal, rattache à leurs ouailles : ils sont merveilleusement armés pour acclimater la vérité dans les âmes« . Est ainsi relayé au demeurant ce que Grégoire XVI traçait pour objectif, dès 1845, dans l’encyclique Neminem Perfecto.

-Enfin, Maximum illud se veut lucide sur les dérives nationalistes ou colonialistes auxquelles a pu tendre la Mission, dans certaines circonstances encore bien réelles, avant 1914 : « Le missionnaire catholique se rappelle toujours qu’il représente les intérêts du Christ et en aucune manière ceux de son pays. » On ne peut douter que les grandes puissances européennes étaient visées, celles qui se partagèrent le monde au XIXe siècle. Ce thème a donné lieu à de nombreux travaux d’historiens, et François lui-même souligne la pertinence de cette exigence de son prédécesseur.

Au-delà de son enseignement religieux proprement dit, l’encyclique Maximum illud est donc un document historique de grand intérêt, qui a certainement contribué au renouvellement de cette vision du monde qu’appelaient les Traités de paix alors en négociation.

Peuples du Monde n°485

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